Fabrice Weissman, membre de l'équipe d'intervention d'urgence de MSF à l'hôpital central Queen Elizabeth de Blantyre, décrit la situation.
L'épidémie se développe rapidement depuis mi-décembre. À ce moment-là, la majorité des nouveaux cas positifs concernaient des travailleurs malawites de retour d'Afrique du Sud, alors qu'aujourd'hui presque tous les nouveaux cas sont liés à une transmission locale.
Il y a une très forte probabilité que le variant 500Y.V2 du Covid-19 identifié en Afrique du Sud soit responsable de cette deuxième vague. Selon les données scientifiques actuelles, ce variant ne produit pas davantage de cas sévères, mais est 50% plus transmissible que la souche d'origine. Le nombre de patients hospitalisés en raison du Covid-19 au Malawi a ainsi doublé chaque semaine depuis début janvier.
Si l'épidémie dans le pays suit le même schéma qu'en Afrique du Sud (avec un pic de la deuxième vague atteint au bout de neuf semaines), on peut s'attendre à ce que le nombre de patients graves nécessitant des soins hospitaliers augmente de façon continue jusqu'à mi-février.
Les points chauds de l'épidémie sont concentrés dans les deux villes principales du pays - Lilongwe dans le centre et Blantyre dans le sud - soit une population d'environ deux millions de personnes.
Le nombre de patients atteints d'une forme sévère de Covid-19 hospitalisés au Queen Elizabeth est passé de douze à 107 entre le 1er et le 21 janvier, dépassant ainsi la capacité maximale actuelle de 80 patients pour la prise en charge du coronavirus.
Cela met une forte pression sur l'établissement, notamment en ce qui concerne les ressources humaines, les équipements et consommables médicaux et l'approvisionnement en oxygène. MSF apporte son soutien dans ces trois domaines pour répondre à l'appel à l'aide de l'hôpital.
Notre priorité est désormais de protéger le personnel de première ligne pour assurer une prise en charge opérationnelle. Plus de dix membres de l'équipe ont été diagnostiqués positifs au cours des dix derniers jours. Heureusement, aucun d'entre eux n'a développé de symptômes sévères à ce jour. Pourtant, cela met une pression énorme sur notre capacité de réponse.
Notre deuxième objectif est de réduire la mortalité des patients qui se rendent à l'hôpital central Queen Elizabeth, qui est le seul établissement public offrant une prise en charge des patients sévères à Blantyre, où plus d'un tiers des cas sont signalés. L'hôpital fait un excellent travail dans des circonstances difficiles.
Nous avons embauché 50 agents de santé supplémentaires pour renforcer leur équipe et nous aidons à gérer l'approvisionnement en oxygène. Néanmoins, la demande dépasse de loin la capacité de production nationale et nécessite ainsi d'importer des bouteilles et des concentrateurs, actuellement en pénurie.
Nous fournissons du personnel, de l'oxygène et un soutien technique aux services de prise en charge du Covid-19 de l'hôpital central Queen Elizabeth. Nous mettons également en place une salle supplémentaire de 40 lits pour traiter les personnes atteintes du coronavirus, qui sera entièrement équipée par MSF. Outre le nombre important de patients se présentant à l'hôpital, il semblerait que de nombreuses personnes avec une forme sévère de la maladie n'atteignent pas les structures de santé et meurent probablement à domicile. Notre prochain objectif est donc d'améliorer le transfert précoce de ces patients, afin d'optimiser leur chance de survie.
Pour contenir le nombre d'infections et de décès causés par cette nouvelle vague, le Malawi a un besoin urgent d'accéder à la vaccination. Cette dernière aurait pu protéger de nombreuses victimes de la Covid-19. Malheureusement, il est fort peu probable que le vaccin soit disponible dans le pays avant avril 2021.
