Cinq faits sur la guerre à Gaza

Tandis que le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu s'est adressé au Congrès américain, les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) tentent de continuer à répondre aux besoins immenses des Gazaouis, malgré le siège imposé par Israël et les entraves répétées dans l’acheminement de l’aide humanitaire. Selon le ministère de la Santé à Gaza, plus de 39 000 Palestiniens ont été tués, dont un grand nombre de femmes et d’enfants, et plus de 90 000 autres ont été blessés depuis le début de la guerre menée par Israël à la suite des attaques du Hamas sur son territoire, le 7 octobre.

L'armée israélienne continue de blesser et de tuer des civils. Elle empêche l'acheminement d'une aide humanitaire vitale. De nombreux Palestiniens ont été déplacés à plusieurs reprises, y compris des membres du personnel de MSF. Ils luttent quotidiennement pour répondre à leurs besoins les plus élémentaires - trouver de la nourriture, de l’eau, un endroit où dormir, des soins. 
 
Neuf mois d’intenses bombardements israéliens et de combats ont anéanti le système de santé. Depuis le début de la guerre, MSF a fourni un soutien chirurgical, de la physiothérapie, mais aussi des soins maternels, pédiatriques, de santé primaire et un soutien psychologique. MSF mène actuellement des activités médicales dans deux hôpitaux, ceux d’Al-Aqsa et de Nasser, ainsi que dans huit centres de santé. 

Les Gazaouis sont pris au piège des bombardements incessants et des combats au sol. Les forces israéliennes ont bombardé à plusieurs reprises des endroits désignés comme des « zones humanitaires », notamment des camps et des campements informels où vivent des personnes déplacées, ainsi que des entrepôts humanitaires. Samedi 13 juillet, les équipes MSF travaillant à l'hôpital Nasser ont reçu un afflux massif de blessés après que des frappes israéliennes ont touché une zone densément peuplée à Al-Mawasi - une zone où les forces israéliennes avaient conseillé à la population de se rendre. Les attaques indiscriminées et l'utilisation d'armes explosives sur des zones densément peuplées ont tué et mutilé des milliers de personnes. 

Selon les Nations unies, environ 1,9 million de Palestiniens ont été déplacés de force par la guerre, soit 90 % de la population de Gaza. Nombre d’entre eux ont été déracinés à plusieurs reprises. Ils vivent dans la rue, dans des conditions effroyables, sous des tentes de fortune, exposés aux bombardements. Ils sont particulièrement vulnérables aux maladies infectieuses qui peuvent se propager rapidement dans la promiscuité.

Le système de santé de Gaza a été anéanti. L'armée israélienne a détruit des hôpitaux et des centres de santé, de façon systématique. Moins de la moitié des hôpitaux de Gaza sont opérationnels alors que les besoins médicaux de la population ne cessent d’augmenter. 

Les équipes de MSF voient des patients souffrant de blessures sévères telles que des amputations, des membres écrasés et des brûlures graves. Un nombre choquant de patients pris en charge par MSF sont des enfants. Environ 32 % des Gazaouis tués depuis le 7 octobre sont des enfants.

Des milliers de personnes blessées ont été amputées et ont besoin de plusieurs opérations chirurgicales spécialisées et de séances de physiothérapie sur le long terme. Outre les conséquences directes de la guerre, nous constatons également un nombre important de décès qui auraient pu être évités : ces morts, dues par exemple à des maladies chroniques (cancers et problèmes rénaux notamment) sont causées par l'interruption de soins essentiels comme la chimiothérapie et la dialyse.

L'impossibilité d'acheminer des fournitures dans la bande de Gaza, causée en partie par la fermeture du point de passage de Rafah, ne fait que détériorer l'accès aux soins des Gazaouis. 

Le siège imposé par Israël et l’entrave de l’aide humanitaire privent les civils de fournitures essentielles, notamment de carburant, de nourriture, d'eau et de médicaments. Ce n’est pas un problème logistique, c’est un problème politique. 

Entre la fin du mois d’avril et le milieu du mois de juillet, MSF n'a pas pu acheminer de l'aide à Gaza, ce qui a entraîné de graves pénuries. Entre le 10 et le 15 juillet, six camions transportant des produits médicaux essentiels ont été autorisés à entrer par le poste frontière de Kerem Shalom : c’est une goutte d'eau par rapport aux besoins immenses d'une population exsangue. Les retards sont dus à plusieurs facteurs, notamment le contrôle exercé par Israël sur les points d'entrée et de sortie de la bande de Gaza.

Les établissements médicaux bénéficient d'une protection particulière en vertu du droit international humanitaire, conçu pour protéger la vie des civils. Les forces israéliennes ont à plusieurs reprises bombardé et pris d’assaut des hôpitaux et des centres de santé. Elles ont attaqué des convois, détenu du personnel de santé et détruit des véhicules à l’aide de bulldozers. 

Depuis le 7 octobre, environ 500 membres du personnel médical ont été tués à Gaza, dont six de nos collègues. Nos équipes ont dû évacuer 14 structures de santé et ont subi 26 incidents violents. 

À Gaza comme partout ailleurs, les hôpitaux et le personnel médical doivent être protégés. 

MSF a appelé à plusieurs reprises les alliés d'Israël, y compris les États-Unis, à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour qu’Israël cesse ses attaques contre les civils et les infrastructures civiles à Gaza. En mai, un rapport du département d'État américain a conclu que, bien qu'il soit « raisonnable d'estimer » qu'Israël a violé le droit international humanitaire à Gaza, il n'y avait pas suffisamment d'informations disponibles pour vérifier si des armes américaines avaient été utilisées lors d'incidents spécifiques contrevenant à la loi ou à la politique américaine en matière d'armement. 

En tant que principal soutien militaire et financier d’Israël, les États-Unis ont l'obligation d'évaluer si la conduite de la guerre est conforme aux lois internationales et américaines, conçues pour protéger les civils. Les États-Unis ont également l’obligation d'appliquer les procédures légales appropriées. Conscients des dégâts dévastateurs causés par l’utilisation d’armes explosives dans des zones peuplées, les États-Unis et 82 autres États, dont la plupart sont des alliés de l'OTAN, ont approuvé la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l'utilisation d'armes explosives dans les zones peuplées (EWIPA). Israël n'a jamais cessé d'utiliser des armes explosives dans la bande de Gaza, l'une des zones les plus densément peuplées au monde, causant des destructions massives et infligeant des dommages immenses - et prévisibles - aux civils. 

Médecins Sans Frontières s'est joint à d'autres organisations humanitaires et de défense des droits humains pour demander à l'administration américaine d'arrêter d'envoyer des armes explosives destinées à être utilisées à Gaza. 

Tous les États qui soutiennent Israël dans ces circonstances sont moralement et politiquement complices des atrocités commises à Gaza.  

Un cessez-le-feu immédiat et durable respecté par tous les belligérants est essentiel pour mettre fin aux massacres de civils et pour garantir l'acheminement de l’aide humanitaire à Gaza. 

Un cessez-le-feu reste le seul moyen pour les organisations humanitaires comme MSF de se déployer et d’apporter une aide efficace et appropriée aux besoins dans toute la bande de Gaza. Aujourd’hui, l’ampleur des besoins humanitaires dépasse largement la capacité des acteurs humanitaires qui interviennent sur place.

Les civils doivent être protégés de la violence et ont le droit d'accéder à l'aide humanitaire, en particulier aux soins médicaux. 

Le gouvernement américain a la responsabilité, en tant que partenaire et allié du gouvernement israélien, de faire tout ce qui est en son pouvoir pour mettre fin à ces souffrances et instaurer un cessez-le-feu immédiat et permanent.