« Tout ce que nous voulons, c’est pouvoir vivre dignement »
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3 femmes soudanaises témoignent de leurs conditions de vie dans le camp de réfugiés d'Aboutengue, dans l'est du Tchad.
Jimiya Abdallah
Jimiya et sa famille de dix personnes — elle-même, son mari et leurs huit enfants — vivent dans le camp d'Aboutengue depuis plus d'un an, depuis qu'elle a fui le Soudan en juillet 2023. Originaire d'Umm Dukhn :
« Notre vie ici est tragique comparée à celle du Soudan (avant la guerre). Nous n’avons pas assez de ressources, surtout en ce qui concerne la nourriture. »
Pour gagner de l’argent, Jimiya et d’autres femmes se rendent loin dans la forêt autour du camp pour ramasser du bois de chauffage. « La forêt est vraiment loin, mais c’est le seul moyen pour moi de gagner un peu d’argent pour nourrir ma famille. Il n’y a pas d’opportunités d’emploi ici. »
Au début, à leur arrivée, on leur donnait suffisamment de nourriture. « Avant, on nous donnait des haricots et les enfants les adoraient. Mais maintenant, les rations ont diminué. Dernièrement, on ne nous donnait que du sorgho et de l’huile, qui sont très difficiles à cuisiner seuls. Nous préparons généralement de la soupe avec du sorgho, mais sans ingrédients frais comme des légumes ou de la viande, nous ne savons pas vraiment comment la manger. C’est pourquoi nous devons travailler. »
« Nous connaissons MSF, car ils nous ont fourni des savons et des jerrycans lors des précédentes distributions. Lorsque nos enfants tombent malades, nous pouvons nous rendre à la clinique MSF et être soignés. »
« Nous savons aussi que les ONG travaillent dur ici, mais nous avons besoin de suffisamment de nourriture. Nous avons aussi besoin de formations pour trouver du travail – des compétences techniques comme la couture – pour pouvoir subvenir aux besoins de nos familles. Et nous espérons recevoir bientôt des abris adéquats. Nous en avons construit un nous-mêmes, mais c’est un abri temporaire. Nous n’avons pas de matelas, d’ustensiles de cuisine, de couvertures ou de nattes. Il n’y a pas assez de place pour dix personnes, alors nous avons construit deux abris, mais nous n’avons de bâches en plastique que pour l’un d’eux. Le plastique ne suffit pas quand il pleut beaucoup. »
Aziza Idriss
Aziza vit dans le camp d’Aboutengue depuis plus d’un an (elle est arrivée en juillet 2023) avec sa famille de neuf personnes : elle-même, sa mère et ses sept enfants, dont sa fille aînée et son bébé, qui partagent leur abri malgré le fait qu’elle soit mariée. Originaire d’El-Geneina, elle revient sur leurs difficultés :
« La vie dans le camp est difficile. Nous vivons dans de nombreuses difficultés. Nous n’avons pas assez de nourriture. Les distributions de nourriture ont lieu une fois par mois, mais les rations sont si petites que nous manquons généralement de nourriture bien avant la distribution suivante. »
Pour subvenir aux besoins de sa famille, Aziza travaille habituellement dans des fermes voisines. « Nous manquons de tout. Je devais travailler aujourd’hui, mais je suis malade », explique-t-elle.
« Mais aller dans la forêt n’est pas sans risque. Parfois, quand nous sommes dans la forêt, des gens nous menacent en disant que nous n’avons pas le droit de ramasser du bois. Certains d’entre nous ont même été battus. »
« Je suis reconnaissante pour ce que MSF fournit, comme des bâches en plastique, des jerrycans, des moustiquaires, des savons et, bien sûr, des soins médicaux. Mais nous avons vraiment besoin d'abris adéquats et de suffisamment de nourriture pour survivre. »
« Quand je compare ce qu’était notre vie au Soudan avant la guerre à ce que nous avons aujourd’hui, cela me trouble vraiment. Tout ce que nous voulons, c’est vivre dans la dignité, comme avant. »
Mariam Yahia
"Nous sommes arrivés au camp d’Aboutenge en août 2023. Nous sommes une famille de 11 personnes : mes parents, moi-même et mes huit frères et sœurs. J’ai 22 ans, je suis le deuxième aîné de la famille. Nous venons d’El-Geneina.
Les conditions de vie ici sont difficiles. La nourriture que nous recevons n’est pas suffisante et nous ne pouvons pas tenir le mois avec ce que l’on nous donne. Non seulement la quantité a diminué, mais la variété aussi. Nous recevions auparavant des haricots dans les rations, ce qui était idéal pour le déjeuner, mais ce n’est plus le cas.
L’eau est également insuffisante. Les points d’eau dont nous dépendons sont partagés par trop de personnes et, compte tenu de la taille de notre famille, nous devons remplir notre jerrycan deux fois par jour.
Nous n’avons pas non plus d’abri adéquat. Même si nous avons construit celui-ci du mieux que nous avons pu, il n’est pas assez grand pour toute la famille.
Je suis également inquiète quand je vois des jeunes de mon âge qui n’ont rien à faire. Beaucoup d’entre eux travaillaient au Soudan et subvenaient aux besoins de leur famille. Aujourd’hui, je vois beaucoup d’entre eux qui n’ont aucune orientation…
Quatre de mes frères travaillent désormais dans d’autres régions du Tchad. Deux d’entre eux sont retournés au camp de transit d’Adré il y a quelques mois et l’un de mes frères plus jeunes travaille maintenant dans une mine, loin d’ici. Ils font cela pour pouvoir nous envoyer de l’argent pour survivre.
Mon plus grand souhait est que la paix revienne au Soudan. Mon Soudan. Pour l’instant, j’espère que la situation dans le camp va s’améliorer, pour moi, pour ma famille, pour tout le monde.