Stephen Cornish, directeur général de MSF en visite à l'hôpital géré par MSF dans le camp de réfugiés d'Adré, à l'est du Tchad.
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Soudan : "Il faudra bien plus que faire taire les armes"

Le mercredi 14 août 2024

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La semaine dernière, des négociations de paix pour mettre fin à la guerre au Soudan se sont déroulées à Genève sous l'égide des États-Unis, de l'Arabie saoudite et de la Suisse. Il s'agissait d'une première étape cruciale dans le long et difficile processus pour construire les bases d'une paix dans ce pays déchiré. Mais ce n'était rien d'autre qu'une étape.

Si le dialogue politique est essentiel, il faudra bien plus que faire taire les armes pour restaurer la dignité et le bien-être à des millions de personnes.

La crise au Soudan est complexe. Dix millions de personnes, soit un tiers de la population, sont déplacées, ce qui en fait la plus grande crise de déplacé·e·s au monde. La malnutrition sévit largement, et même la capitale – sur la ligne de front depuis avril 2023 – est menacée. Entre janvier et juin 2024, Médecins Sans Frontières (MSF) a soigné plus de 20 000 enfants souffrant de malnutrition, un nombre catastrophique. Le système de santé s'est effondré, 70 à 80 % des établissements ne fonctionnent plus, privant d'innombrables personnes de soins.

Après 16 mois de guerre, les deux belligérants continuent d'entraver l'accès humanitaire, empêchant systématiquement l'aide d'atteindre les zones contrôlées par leurs opposants. Pour le personnel humanitaire, l'accès est souvent restreint, sans garantie de sécurité, et parfois même inexistant. Ces conditions ont contraint MSF à suspendre certaines activités, mais nos équipes continuent de travailler dans huit des 18 États du Soudan. Nous sommes l'une des rares organisations humanitaires internationales à intervenir encore des deux côtés, mais les besoins sont immenses.

Stephen Cornish Directeur Général de MSF

Deux millions de personnes ont fui vers les pays voisins, comme le Tchad. En décembre lors de ma visite au camp de transit d'Adré, dans l'est du Tchad, la plupart des réfugié·e·s soudanais·es que j'ai rencontré·e·s avaient quitté leur pays à cause de la violence et de la faim. La guerre empêche les cultivateur·rice·s de planter et de récolter, les étals des marchés sont vides ou les prix trop élevés.

Pour éviter que la situation ne se détériore davantage, un accès sûr et sans restriction doit être accordé à une intervention humanitaire de grande ampleur, indépendamment de tout cessez-le-feu. Il faut garantir l'accès de l’aide, la sécurité et la protection des civils et des missions humanitaires.

L'aide des deux côtés de la frontière est vitale, d'autant que la saison des pluies rend les itinéraires d'approvisionnement impraticables. La production alimentaire locale et l'importation traditionnelle ont été gravement perturbées et il faudra beaucoup de temps et d'investissements pour les rétablir, du temps que la population soudanaise n’a pas.

Les espoirs de paix nécessitent un engagement collectif à long terme des deux parties au conflit mais aussi un engagement coordonné et durable de la part de la communauté internationale avec un financement adéquat.  

Même avec un cessez-le-feu, la crise humanitaire au Soudan se poursuivra.

La route vers le rétablissement du Soudan exige bien plus que des réponses d'urgence. Le pays a besoin de partenaires à long terme – organisations humanitaires, agences de développement et fonds de reconstruction – pour aider le peuple soudanais à se reconstruire. Le processus de paix doit s'accompagner d'actions concrètes sur le terrain.

Les véritables efforts sont encore à venir.

Stephen Cornish, directeur général de MSF

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