Omar se tient dans les décombres de sa maison après qu'elle ait été rasée par les forces israéliennes dans le camp de réfugiés de Jénine.
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Reportage photo: Vivre dans la peur des incursions militaires

Le vendredi 20 septembre 2024

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Le 28 août au petit matin, les forces israéliennes ont lancé une incursion militaire de grande envergure dans les villes de Tulkarem, Jénine et Tubas. Cette incursion a été la plus intense depuis 2002 en termes d’ampleur des destructions et des victimes. Au total, 39 Palestiniens ont été tués selon le ministère de la Santé.


A Jénine, l’incursion de 9 jours a été extrêmement destructrice. Une grande partie des infrastructures routières a été détruite, ainsi que les raccordements à l’électricité et à l’eau, en particulier dans le camp de réfugiés et dans le quartier est de la ville. La population a été piégée, avec un accès limité aux soins de santé, car des véhicules militaires ont été placés devant les hôpitaux et les ambulances et les travailleurs de la santé ont été fouillés à plusieurs reprises, voire attaqués. L’accès à l’électricité, à l’eau et à d’autres biens de première nécessité a été compromis, et les habitants craignaient d’être abattus lorsqu’ils quittaient leur domicile.

Ces incursions de plus en plus fréquentes et imprévisibles en Cisjordanie pèsent lourdement sur la santé physique et mentale des Palestiniens. Une partie importante de la population vit avec un traumatisme permanent et avec la peur constante de la prochaine incursion.

Les activités de MSF ont été fortement impactées par l’incursion de grande ampleur à Jénine : les formations habituelles et les activités de santé mentale ont été suspendues, tandis que l’incursion se poursuivait, un don de médicaments, de couches et de lait pour bébé a été fait aux volontaires qui livraient des produits de première nécessité aux personnes bloquées dans le camp. Depuis le départ des forces israéliennes le vendredi 6 septembre, les équipes de MSF ont fait don de bouteilles et de réservoirs d’eau et ont repris leurs activités de premiers secours psychologiques.

Dans ce contexte de violences récurrentes et accrues, la santé mentale de la population est extrêmement préoccupante, en particulier depuis le début de la guerre à Gaza. Au total, 705 Palestiniens ont été tués et 5 700 blessés en Cisjordanie depuis le 7 octobre 2023 selon le ministère de la Santé.

Les personnes qui reçoivent un soutien psychologique déclarent être désespérées, anxieuses et craintives face à la peur constante des incursions à venir, aux enfants confrontés à l’insomnie, aux traumatismes et à d’autres problèmes connexes.

Après l'incursion de 9 jours qui a eu lieu à Jénine du 28 août au 6 septembre, les équipes MSF ont repris leurs activités de premiers secours psychologiques dans le camp de réfugiés
Après l'incursion de 9 jours qui a eu lieu à Jénine du 28 août au 6 septembre, les équipes MSF ont repris leurs activités de premiers secours psychologiques dans le camp de réfugiés.

Après l'incursion de 9 jours qui a eu lieu à Jénine du 28 août au 6 septembre, les équipes MSF ont repris leurs activités de premiers secours psychologiques dans le camp de réfugiés. Salwa et Rahma visitent le camp chaque semaine pour rencontrer les résidents et évaluer leur santé mentale et leur évolution.

« Le niveau de destruction ne cesse de s’accroître et l’impact psychologique est énorme », explique Rahma. « Les habitants pensent que ce qui se passe à Gaza se produira également dans le camp. De nombreuses personnes, en particulier les femmes et les enfants, souffrent de symptômes de traumatisme psychologique et développent des problèmes d’alimentation et de sommeil, comme des cauchemars récurrents et de l’anxiété en raison de la peur des incursions qui se produisent souvent la nuit. »

Les gens ne se sentent pas en sécurité étant donné la brutalité des incursions et l’impossibilité de prévoir quand la prochaine aura lieu. Dans ce contexte, un traitement psychologique est difficile car le traumatisme est permanent.

Lors de la dernière incursion, les forces israéliennes ont détruit une grande partie des infrastructures routières et ont coupé l'accès à l'électricité et à l'eau. Une semaine après le retrait des forces militaires, les habitants ont toujours du mal à accéder à l'eau potable, car de nombreuses pompes ont été coupées et des réservoirs d'eau ont été détruits par des balles.

De nombreuses maisons du camp de réfugiés de Jénine sont marquées par des impacts de balles. Les habitants parlent d'occupations récurrentes de maisons par des soldats israéliens qui occupent également des positions stratégiques pour creuser un trou pour les snipers.

Lors de la dernière incursion, les forces israéliennes ont détruit une grande partie des infrastructures routières et ont coupé l’accès à l’électricité et à l’eau.
Lors de la dernière incursion, les forces israéliennes ont détruit une grande partie des infrastructures routières et ont coupé l’accès à l’électricité et à l’eau.

Selon les dernières estimations, le camp de réfugiés de Jénine compte environ 12 000 personnes. Il s'agit d'une forte baisse par rapport aux chiffres précédents, car les gens quittent le camp en raison de l'insécurité causée par les incursions fréquentes.

Jénine a été le théâtre de nombreuses incursions militaires israéliennes violentes depuis le début de la deuxième Intifada en 2000.

Selon les dernières estimations, le camp de réfugiés de Jénine compte environ 12 000 personnes.

Salah est un ambulancier volontaire formé par MSF. Ce diplômé en droit de 29 ans vit dans le camp de réfugiés de Jénine. Lors des incursions militaires, il conduit le tuk-tuk offert par MSF pour transporter les personnes ayant besoin de soins médicaux.

« C’est très effrayant de conduire dans les rues car on peut se faire tirer dessus à tout moment », explique Salah, « mais c’est le seul moyen de sortir les patients du camp pour qu’ils reçoivent des soins médicaux ».

Salah fait partie d’un groupe de 27 ambulanciers volontaires qui travaillent dans le camp. Ils risquent tous leur vie pour fournir des soins vitaux à la population du camp.

Salah est un ambulancier volontaire formé par MSF.
Salah est un ambulancier volontaire formé par MSF.
Salah est un ambulancier volontaire formé par MSF.

Nour dit qu’elle est toujours en colère : « Je n’ai plus peur, ils ont essayé de me terroriser à plusieurs reprises et m’ont interrogée, mais je n’ai pas peur ». Depuis que Nour a perdu son mari, elle est en mode survie et a perdu l’appétit pour les choses qu’elle aimait faire. Elle coud et essaie d’oublier à quel point la situation de sa famille est difficile. « Mon mari est toujours avec moi, il m’accompagne partout où je vais, il me manque trop ».

Pour Nour, la destruction des infrastructures du camp a eu un impact énorme sur elle et ses voisins : « Ils ont tiré sur nos deux réservoirs d’eau, donc nous avons perdu l’eau courante. Le pire pour moi, c’est de ne pas pouvoir me déplacer librement, il y avait un peu de vie dans le camp avant, mais maintenant les rues sont vides, c’est déprimant ».

Nour dit qu’elle est toujours en colère : « Je n’ai plus peur, ils ont essayé de me terroriser à plusieurs reprises et m’ont interrogée, mais je n’ai pas peur ».

Lors de la dernière incursion, des soldats israéliens ont fait irruption dans la maison d’Anwar. Il a raconté comment ils ont brisé les fenêtres et mis le feu au deuxième étage qui était en construction pour son fils aîné. Sa femme a passé 6 mois en prison, sans inculpation ni mandat d’arrêt. Il s’occupait seul de sa fille de 4 ans. « Chaque nuit, elle criait après sa mère. Je ne pouvais pas dormir et j’essayais de la distraire en jouant avec ses jouets ».

Lorsque sa mère a été libérée et est revenue à la maison, elle a trouvé sa fille psychologiquement traumatisée. « Chaque fois qu’elle entend des sirènes ou d’autres bruits, elle crie. Elle a peur qu’on m’enlève d’elle », explique sa mère.

La peur d’une incursion imminente est toujours présente. « Nous avons nos sacs et nos chaussures prêts à l’entrée au cas où ils reviendraient, afin que nous puissions fuir à temps », explique Anwar

Lors de la dernière incursion, des soldats israéliens ont fait irruption dans la maison d’Anwar.Lors de la dernière incursion, des soldats israéliens ont fait irruption dans la maison d’Anwar.
Lors de la dernière incursion, des soldats israéliens ont fait irruption dans la maison d’Anwar.Lors de la dernière incursion, des soldats israéliens ont fait irruption dans la maison d’Anwar.

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