Des réfugiés soudanais attendent leur tour pour aller chercher de l'eau potable à un point d'eau fourni par MSF dans le camp de réfugiés d'Aboutengue
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MSF sonne l’alerte sur la pénurie de nourriture pour les réfugiés soudanais dans l'est du Tchad

Le mardi 17 septembre 2024

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L’absence de financement durable et planifié pour la réponse humanitaire dans les camps expose les réfugiés à des souffrances et à des risques sanitaires toujours plus grands, prévient MSF, appelant les donneurs institutionnels à revoir d’urgence leurs politiques de financement.

Alors que la guerre civile au Soudan continue de faire rage et de pousser les gens à quitter le pays, les besoins humanitaires, notamment l'accès à une quantité de nourriture suffisante, restent critiques dans les camps de réfugiés de l'est du Tchad, qui ont accueilli plus d'un demi-million de réfugiés depuis le début de la guerre en avril 2023.

À Aboutengue, l’un des camps, près de 44 500 réfugiés soudanais – dont une majorité de femmes et d’enfants – sont confrontés à de graves réductions des rations alimentaires et à de mauvaises conditions de vie en raison du manque d’abris adéquats.

« La vie ici est tragique par rapport au Soudan [avant la guerre] », explique Jimiya, arrivée à Aboutengue avec sa famille en juillet 2023. « Au début, on nous donnait suffisamment de nourriture, mais maintenant les rations ont diminué. Récemment, nous n’avons reçu que du sorgho et de l’huile, qui sont difficiles à cuisiner sans ingrédients frais. Nous n’avons pas assez de nourriture pour subvenir aux besoins de notre famille, surtout des enfants. »

Nafissa tenant la main de sa fille Amira, toutes les deux vivent dans le camp de réfugiés d'Adré, au Tchad

Depuis février, les rations alimentaires ont progressivement diminué. L’incertitude sur le financement a entraîné d’importantes perturbations et des retards dans l’approvisionnement.

« Nous prêtons une attention particulière à ces pénuries récurrentes dans les distributions de nourriture », explique Danielle Borges, coordinatrice d’urgence pour MSF dans l’est du Tchad. « Il serait dévastateur que les lacunes de cette réponse humanitaire renforcent la crise alimentaire dans ces camps. »

L’isolement géographique du camp d’Aboutengue, situé dans une zone reculée avec très peu de possibilités de subsistance, rend les réfugiés encore plus dépendants de cette aide alimentaire inadéquate. Sans nourriture ni soutien financier suffisants, les femmes doivent parcourir de longues distances à pied, au cœur des forêts environnantes, pour ramasser du bois de chauffage, ce qui constitue l’un des rares moyens de gagner de l’argent. Mais cette pratique comporte de sérieux risques.

« Parfois, quand nous sommes dans la forêt, des gens nous menacent en disant que nous n’avons pas le droit de ramasser du bois », raconte Aziza, une réfugiée soudanaise, mère de sept enfants, qui vit dans le camp depuis juillet dernier. « Certains d’entre nous ont même été battus. »

Un fagot de branches sèches se vend entre 1 et 3 euros sur les marchés informels qui ont surgi autour du camp. Le manque de ressources et de nourriture oblige les réfugiés à continuer à ramasser du bois de chauffage pour survivre.

« L’une des rares sources de revenus pour les femmes du camp d’Aboutengue consiste à ramasser du bois de chauffage dans les forêts environnantes et à le vendre pour quelques livres sterling en raison du manque de nourriture et de soutien financier », explique Atsuhiko Ochiai, coordinatrice de projet MSF. « Cette activité expose les femmes à des risques de violence, mais elle est devenue si vitale pour elles qu’elles n’ont pas d’autre choix. Malheureusement, les histoires de femmes agressées dans la forêt continuent. »

Des réfugiés construisent leurs abris dans le camp de réfugiés d'Aboutengue, région du Ouaddaï, Tchad.

Un repas par jour pour survivre

La diminution des portions de nourriture pourrait entraîner une augmentation de la malnutrition, en particulier chez les enfants. « Dans le camp d’Aboutengue, MSF traite chaque mois des centaines d’enfants souffrant de malnutrition modérée et aiguë sévère », prévient Borges. « Nous craignons que cette situation ne s’aggrave si les pénuries alimentaires persistent »

A Metché, à deux heures d’Adré, la situation est tout aussi alarmante. De nombreux réfugiés survivent désormais avec un seul repas par jour. Alors que des distributions de nourriture ont eu lieu ces derniers mois à Metché et dans les camps voisins d’Alacha et d’Arkoum, les réfugiés reçoivent un faible nombre de calories par portion.

Le centre nutritionnel thérapeutique hospitalier (CNT) de l'hôpital MSF de Metché est le service le plus fréquenté, avec une augmentation de janvier à août du nombre d'enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère avec complications arrivant des camps d'Alacha et d'Arkoum : 11 enfants de Metché ont fait des rechutes après avoir été libérés entre début août et septembre.

Il est urgent de renforcer le soutien nutritionnel et les solutions logistiques pour éviter une nouvelle détérioration de la situation.

La situation des réfugiés est aggravée par le manque de financement durable et planifié de l’aide humanitaire. « Le sentiment général est que cette crise est négligée par les principaux donateurs », déclare Borges. « Sans un soutien immédiat et substantiel, nous risquons de voir une catastrophe humanitaire encore plus grave se produire dans cette région. »

« Nous sommes reconnaissants de l’aide que nous avons reçue des ONG », explique Jimiya, « mais nous avons besoin de suffisamment de nourriture, d’un abri décent et d’opportunités de travail pour vivre dignement, comme avant. »

Depuis plus d'un an, MSF fournit des soins médicaux essentiels, de l'eau et des installations sanitaires aux réfugiés du camp d'Aboutengue, notamment en traitant la malnutrition et en distribuant des produits de première nécessité comme du savon, des moustiquaires et des jerrycans. Malgré leur réinstallation dans ce camp il y a 14 mois, environ 14 000 réfugiés manquent toujours d'abris adéquats et continuent de vivre dans des structures de fortune dans des conditions extrêmement difficiles.

Un camion transportant des milliers de bâches en plastique, de moustiquaires et de savons est déchargé par les équipes MSF sur le site de distribution du camp de transit d'Adré.

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