Christos Christou, président de MSF International, visite le centre de traitement du choléra récemment ouvert à Maiduguri, dans l'État de Borno.
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Malnutrition et épidémies galopantes ravagent le nord du Nigeria

Le lundi 14 octobre 2024

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Le Dr Christos Christou, Président de MSF International, était en déplacement dans l'état de Borno, au Nigéria. Depuis le mois du septembre, le Nigéria est touchée par de graves innondations dans plusieurs réions, aggravant la situation humanitaire en cours.

Lorsque j'ai entendu parler des inondations qui ont frappé Maiduguri, en plus des défis extrêmes auxquels les habitants de la région sont confrontés depuis des décennies, j'ai voulu faire la lumière sur les défis qui affectent les populations. En venant au Nigeria, j'ai compris pourquoi les inondations massives de Maiduguri ont attiré l'attention du monde entier : leur ampleur choquante a touché des millions de personnes. Mais ce n'est pas la seule région du Nigeria touchée par les inondations. Les habitants du nord du pays ont beaucoup souffert : malnutrition galopante, épidémies fréquentes de maladies évitables par la vaccination, manque d'installations et de personnel médicaux, le tout aggravé par une insécurité permanente. Les gens doivent à nouveau chercher un abri temporaire dans des camps de déplacés, reconstruire leurs maisons et essayer de déterminer ce qu'il reste de leurs terres agricoles. Ces inondations ayant eu lieu à la fin de la période de soudure, elles ont privé les agriculteurs de l'espoir, même illusoire, de récolter.

Lors de ma visite à Maiduguri, je me suis rendu dans les hôpitaux et les cliniques où MSF travaille. Nous soutenons le système de santé local dans la lutte contre le paludisme et d'autres maladies, ainsi que dans l'accès aux services de maternité. Récemment, nous avons dû mettre en place un centre de traitement du choléra, après qu'une épidémie de choléra a été officiellement déclarée. Tout cela s'est produit dans le contexte d'une crise de malnutrition catastrophique. 

L'un de mes collègues, un médecin nigérian qui travaille avec MSF depuis plus de huit ans, m'a dit que cette année était très différente. Chaque année, dit-il, pendant cette saison, nous voyons un nombre impressionnant d'enfants mal nourris arriver à l'hôpital dans un état grave. Mais cette année, alors que le pic est censé être passé, le nombre de patients admis à l'hôpital ne diminue pas. Pire, l'état dans lequel ces enfants arrivent est encore plus grave que d'habitude. Très souvent, les gens n'ont même pas accès aux soins médicaux de base là où ils vivent, et n'ont pas assez d'argent ou de moyens de transport disponibles. Par conséquent, ils nous parviennent trop tard. Aujourd'hui, de nombreuses organisations qui apportaient leur soutien à Maiduguri et dans d'autres régions du nord du Nigeria ont dû réduire leur budget, voire cesser leurs activités. MSF, une organisation non gouvernementale qui dépend de dons privés, sera-t-elle en mesure d'aider tous ceux qui sont dans le besoin ? Mon collègue avait l'air vraiment effrayé.

Ces dernières années, MSF a constaté une augmentation significative du nombre d'admissions pour malnutrition. Les chiffres de 2022 et 2023 étaient déjà très élevés. Mais entre janvier et août de cette année, nous avons constaté une augmentation de 51 % des admissions d'enfants souffrant de malnutrition sévère, par rapport à la même période l'année dernière. Au cours des huit premiers mois de l'année, nous avons traité 52 725 enfants souffrant de malnutrition sévère, une affection potentiellement mortelle, dans l'ensemble du nord du Nigeria.

Christos Christou, président international de MSF, visite l'hôpital pédiatrique soutenu par MSF à Maiduguri, dans l'État de Borno, au Nigéria, et s'entretient avec le personnel qui aide les enfants souffrant de rougeole et de paludisme.

En outre, les épidémies de maladies évitables par la vaccination, telles que la rougeole, sont récurrentes au Nigeria et constituent l'une des principales causes de décès chez les enfants. Rien qu'entre janvier et août de cette année, nous avons déjà traité plus de 12 500 cas de rougeole. C'est presque le double de la même période l'année dernière. Les épidémies de maladies infectieuses augmentent considérablement les risques de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans. Les enfants non vaccinés de cette tranche d'âge sont particulièrement vulnérables aux maladies évitables par la vaccination, maladies qui augmentent le risque de malnutrition aiguë.

À cela s'ajoute le paludisme. Le Nigeria a les taux de paludisme les plus élevés au monde, représentant près de 27 % de la charge mondiale de cette maladie. Pourtant, celle-ci peut être prévenue et traitée. Malheureusement, dans la plupart des projets, nous constatons que nos services de lutte contre le paludisme sont débordés et que des enfants continuent d'en mourir.

Nous voyons tous clairement que l'ampleur des crises humanitaires est dévastatrice. Nous devons intensifier les soins vitaux contre la malnutrition, en mettant l'accent sur les programmes de prévention afin d'agir avant que les enfants ne tombent gravement malades. L'amélioration de la couverture vaccinale nécessite des services de vaccination de routine, avec un investissement soutenu des autorités pour maintenir les soins de santé de base, ainsi que des campagnes de rattrapage qui s'étendent aux enfants de moins de cinq ans.   

Christos Christou, président international de MSF, visite l'hôpital pédiatrique soutenu par MSF à Maiduguri, dans l'État de Borno, au Nigéria, et s'entretient avec le personnel qui aide les enfants souffrant de rougeole et de paludisme.

La communauté humanitaire est confrontée à de nombreux défis au niveau mondial, l'ampleur des situations d'urgence dépassant tout ce que l'on peut imaginer en termes de quantité et d'échelle. Mais au Nigeria, des milliers de familles viennent de perdre leurs récoltes. Elles n'ont déjà pas accès aux soins de santé de base et luttent pour leur survie depuis de nombreuses années. La communauté humanitaire doit agir et fournir l'aide nécessaire dès maintenant. Ce n'est pas le moment de se relâcher, ce n'est pas le moment de s'arrêter. Nous devons aider les personnes qui ont besoin d'assistance maintenant.

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