Logo MSF
Actualité

L’utilisation par Israël des ordres de déplacement constitue un outil de « guerre psychologique et physique » dans sa campagne de nettoyage ethnique à Gaza

Le mardi 27 mai 2025

En 1 clic, aidez-nous à diffuser cette information :

  • Les forces israéliennes continuent d’utiliser systématiquement les ordres de déplacement de dernière minute comme un outil violent, transformant la bande de Gaza en un enfer sur terre pour les Palestiniens. 
  • Les bombardements incessants, un blocus quasi total de l’aide humanitaire et les ordres de déplacement déplacent et piègent des centaines de milliers de personnes dans des espaces toujours plus réduits. 
  • L’état d’alerte constant et l’imprévisibilité des ordres de déplacement ont des conséquences dévastatrices sur la santé mentale des populations, rapporte Médecins Sans Frontières (MSF). 
  • Le déplacement forcé de personnes par ces ordres doit cesser.
Tract contenant l'ordre de déplacement avec le texte suivant : "Avertissement Urgent : À toutes les personnes dans la zone et dans les abris : vous vous trouvez dans une zone de combat dangereuse. Pour votre propre sécurité, déplacez-vous immédiatement vers le sud. Tout déplacement différé met votre vie en danger." Mai, 2025 © MSF
Tract contenant l'ordre de déplacement avec le texte suivant : "Rafah n’est que le commencement." Mai 2025 © MSF
Tract contenant l'ordre de déplacement avec le texte suivant : "Sourate Ash-Shu‘arâ, verset 63 « Alors Nous révélâmes à Moïse : "Frappe la mer de ton bâton." Elle se fendit alors, et chaque partie devint comme une énorme masse imposante. » Habitants de Gaza : L’armée israélienne arrive". Mai 2025 © MSF
Tract contenant l'ordre de déplacement avec le texte suivant : "Rafah n’est que le commencement." Mai 2025 © MSF

Les forces israéliennes détruisent tous les moyens de subsistance des Palestiniens à Gaza à travers une guerre psychologique et physique. Les déplacements forcés font partie de la campagne de nettoyage ethnique menée par les forces et autorités israéliennes contre le peuple palestinien. Ils n’ont nulle part où aller », dénonce Claire Manera, coordinatrice d’urgence de MSF.

Depuis le début de la guerre, les Palestiniens ont été contraints d’évacuer à plusieurs reprises, fuyant pour sauver leur vie, comme l’ont vécu de nombreux membres du personnel de MSF. 

Depuis la rupture du cessez-le-feu par Israël le 18 mars, 31 ordres de déplacement ont été émis, piégeant les Palestiniens dans un cycle sans fin de souffrance. 

Le 19 mai, un seul ordre de déplacement à grande échelle à Khan Younis a couvert 22 % de la bande de Gaza, affectant plus de 70 membres du personnel de MSF, tandis qu’un autre, le 26 mai, couvrait 40 % du centre et du sud de Gaza. 

« Nos collègues sont désespérés », déclare Omar Alsaqqa, responsable logistique de MSF. « Il n’y a plus de tentes, plus d’espace où s’installer, je ne sais pas quoi répondre quand mes collègues me demandent où aller avec leurs enfants au milieu de la nuit. 

Nous n’avons presque plus d’options pour survivre. » 

Ces ordres de déplacement et les zones militaires interdites couvrent désormais environ 80 % de Gaza, et aucune zone n’a été épargnée par les attaques. Le 26 mai, les équipes de MSF ont soigné 17 patients après une attaque très proche de leur centre de santé de Khan Younis, dans le centre de Gaza – précisément dans la zone vers laquelle les gens sont censés se déplacer. Les gens évacuent des zones pour être à nouveau bombardés dans leur nouveau « refuge». 

Environ 600 000 personnes ont été à nouveau déplacées depuis le 18 mars. 

« J’ai réveillé mes enfants et je leur ai dit que nous allions juste sortir un petit moment. Ils ont commencé à pleurer. Ils ont attrapé leurs sacs. J’étais terrifiée mais j’ai essayé de paraître calme, même si mon cœur battait la chamade de peur », raconte Asmaa Abu Asaker, agente de liaison de MSF, après qu’un ordre de déplacement a été émis dans son quartier. 

Une famille palestinienne étend son linge sur sa maison endommagée dans la ville de Jabalya, au nord de la bande de Gaza.
Gaza: « Le déplacement est en soi une perte, tout comme lorsque vous perdez un lieu ou une routine de vie. »
Le 24 avril 2025, nous avons interviewé Iman Abu Shawish, superviseuse en santé mentale pour MSF à Gaza, afin de comprendre l’impact psychologique des ordres de déplacement israéliens.

Ces ordres sont imprévisibles et accompagnés de délais ridiculement courts, plaçant les gens dans une situation impossible

Ils reçoivent des tracts, des messages sur les réseaux sociaux ou un appel téléphonique annonçant une attaque imminente, ce qui leur laisse très peu de temps pour rassembler leurs affaires et chercher un abri. Le simple fait de forcer les gens à fuir à plusieurs reprises, souvent au beau milieu de la nuit, sans aucun endroit où aller et au péril de leur vie, a non seulement un impact physique, mais aussi un coût psychologique immense. 

« Cette fois, je ne veux pas faire mes bagages. Pas de sac, pas de papiers, rien. Je ne sais pas pourquoi, peut-être que mon état d’esprit est mauvais, mais je n’arrive tout simplement pas à intégrer mentalement l’idée de quitter à nouveau la maison », confie Sabreen Al-Massani, psychothérapeute de MSF, déplacée à plusieurs reprises. 

« Une toute nouvelle épreuve a commencé : plus de farine, plus de vivres. J’avais ma propre vie, [maison-travail, travail-maison], une vie normale. Et soudain, je devais vivre avec des inconnus dans un environnement hostile, sans accès aux besoins de base, à courir après l’eau, la recharge du téléphone. Puis un nouvel ordre d’évacuation : toute notre zone a été touchée. » 

Alors que les ordres de déplacement forcent les Palestiniens à s’entasser dans des zones de plus en plus restreintes, les forces israéliennes mènent également des attaques sans même émettre d’ordre de déplacement. Le 9 avril, plus de 20 personnes ont été tuées dans une frappe visant un bloc résidentiel de sept immeubles dans la ville de Gaza. Parmi les victimes figuraient les familles de deux membres du personnel de MSF qui étaient au travail au moment de l’attaque et ont appris par la suite que leurs proches étaient ensevelis sous les décombres. 

Nous vivons dans un état d’alerte constant ; nous pouvons recevoir une notification nous demandant de partir à tout moment. Nous ne pouvons pas dormir la nuit en pensant que nous pourrions être les prochains », dit Al-Massani, décrivant comment les ordres de déplacement affectent gravement la santé mentale et l’anxiété des Palestiniens. 

MSF appelle les forces israéliennes à mettre immédiatement fin au déplacement forcé des populations et à la campagne de nettoyage ethnique en cours contre les Palestiniens à Gaza. Nous appelons également les alliés d’Israël à cesser leur soutien et leur complicité.

Nos actualités en lien