
En Irak, MSF et ses partenaires font une réelle différence pour les patients atteints de tuberculose
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Umm Salam* est assise par terre devant la maison familiale à Sadr City, un quartier animé de Bagdad, la capitale irakienne. Elle serre contre elle sa petite-fille, Zainab*, enveloppée dans son abaya, se remémorant la guérison de la jeune fille.
Dans le cadre d'un programme de Médecins Sans Frontières (MSF) visant à détecter précocement la tuberculose chez les enfants, en collaboration avec le ministère de la Santé, la famille de Zainab a été contactée après que sa tante ait été diagnostiquée avec la tuberculose.
« Ils m'ont demandé de faire tester Zainab, car elle était très proche de sa tante, atteinte de tuberculose pulmonaire », explique Umm Salam.
Bien que Zainab ne présentait aucun symptôme, elle et ses quatre frères et sœurs ont été testés. Les autres ont reçu un traitement préventif, et Zainab a été diagnostiquée. Dès le début du traitement, Zainab et sa grand-mère ont pris l'habitude de faire des allers-retours entre le centre de santé et l'hôpital Ibn al-Baladi de leur district. Ces déplacements s’accompagnaient régulièrement de larmes d'Umm Salam, prise d'un mélange de peur et d'espoir.
« J'ai beaucoup pleuré en apprenant qu'elle avait la tuberculose, mais le médecin m'a réconfortée et m'a assurée que la guérison était possible », raconte-t-elle.
L'histoire de guérison de Zainab n'est pas unique, et elle est partagée par des milliers de familles irakiennes.
Les défis de la lutte contre la tuberculose et les efforts déployés par MSF, le ministère de la Santé, l'Institut national de la tuberculose et le ministère de la Justice pour y parvenir sont évidents. Tant dans le district de Sadr City, qui enregistre plus d'un cinquième des cas de tuberculose en Irak, que dans les centres de détention, où l'incidence est bien plus élevée.
Les défis en matière de diagnostic et de traitement
L'Irak a réalisé d'importants progrès dans la lutte contre la tuberculose ces dernières années, réduisant son incidence d'environ 61 %, selon l'Institut national de la tuberculose.
Pourtant, les personnes les plus à risque sont les enfants, les personnes souffrant de malnutrition, celles dont le diabète est mal contrôlé ainsi que les fumeurs. Le quartier de Sadr City à Bagdad demeure un foyer majeur de la maladie, notamment en raison de la surpopulation, de la pauvreté et de la difficulté d'accès aux soins.
En plus de ces difficultés sociales, le système de santé du pays est confronté à des obstacles techniques et financiers. Les équipements de diagnostic modernes, comme les appareils GeneXpert, sont coûteux et nécessitent un entretien et un approvisionnement réguliers, tandis que les lourdeurs administratives freinent l'achat de médicaments via les circuits internationaux.
Par ailleurs, la stigmatisation demeure l'un des principaux obstacles au traitement, de nombreux patients hésitant à parler de leur maladie ou à se faire soigner par crainte d’être discriminés.


La collaboration au cœur de notre action
MSF mène un programme de lutte contre la tuberculose en Irak depuis 2018 afin de soutenir l'Institut national de la tuberculose et d'adapter les protocoles de traitement aux recommandations de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
Au début, les patients irakiens étaient encore traités par injections quotidiennes — des traitements douloureux, aux effets secondaires toxiques, et peu efficaces. Avec l'introduction de nouveaux médicaments par voie orale, MSF a contribué à la mise en place de protocoles thérapeutiques plus sûrs et plus efficaces.
« Avant 2019, nous disions aux patients atteints de tuberculose pharmacorésistante et à leurs familles que le risque de décès était très élevé », explique le Dr Laith Ghazi, directeur adjoint de l'Institut national irakien de la tuberculose. « Mais après avoir collaboré avec MSF et introduit des protocoles thérapeutiques modernes, le taux de réussite a grimpé à près de 90 %. Dans la région, l'Irak est désormais un leader en matière de traitement. »
Par ailleurs, le soutien de MSF va au-delà du traitement ; nous avons également renforcé le diagnostic grâce à la fourniture d'appareils GeneXpert modernes. Cela a permis de réduire le délai de détection préliminaire d’une résistance médicamenteuse, qui est passée de plus d'un mois à seulement une journée.
MSF a également lancé une initiative de dépistage précoce pour les enfants, conformément aux recommandations de l'Organisation Mondiale de la Santé.
Zainab, comme des dizaines d'autres enfants, a bénéficié d'un dépistage précoce cette année grâce à ce programme. Cette initiative de dépistage, combinée à des séances de sensibilisation communautaire, a commencé à avoir un impact positif. Les familles s'impliquent davantage, et sont plus ouvertes au dépistage et au traitement.

L'action de MSF s'est étendue des structures de santé communautaires aux centres de détention. En 2024, MSF a soutenu des campagnes de dépistage dans plusieurs prisons, en collaboration avec les ministères de la Justice et de la Santé. Nous avons également récemment introduit un traitement préventif oral à court terme, appelé 1HP TPT, administré aux contacts proches pendant un mois seulement, au lieu des six mois requis par l'ancienne version du traitement préventif. Cela a allégé la charge liée à l'observance du traitement, rendant le suivi plus facile et plus réaliste pour les prisons.
« Ce qui rend notre travail en Irak unique, c'est l'étroite collaboration avec les autorités sanitaires et judiciaires nationales », explique le Dr Aparna S. Iyer, coordinatrice médicale du projet MSF pour la tuberculose. « Grâce à cette collaboration, nous avons amélioré le diagnostic et le traitement, et nous avons été les premiers à déployer un traitement préventif à court terme dans les prisons irakiennes. »
Des défis restent à relever pour l’amélioration des soins
Malgré ces succès, il reste de nombreux défis à relever dans la lutte conjointe contre la tuberculose.
Premièrement, le financement du programme national peut varier d'une année à l'autre. Chaque campagne de dépistage non menée, chaque cartouche de test non achetée faute de ressources, affecte les patients et les professionnels qui les soignent. La stigmatisation demeure également un fardeau silencieux, entraînant des retards de dépistage et une grande angoisse pour les patients.
L'idée centrale du travail de MSF avec ses partenaires est de transformer la coopération en résultats concrets et tangibles. Comme l'a déclaré le Dr Laith, un mois de prévention rapide permet de « gagner de la vie» — non seulement parce qu'il raccourcit la durée des traitements, mais aussi parce qu'il rapproche les services de santé de la vie quotidienne des populations et les rend possibles dans des zones surpeuplées aux ressources limitées.
La vérité est simple : la coopération sauve des vies. Les résultats obtenus entre le ministère de la Santé, le ministère de la Justice, l'Institut national de la tuberculose et MSF ne font pas exception — ils illustrent ce qui peut se produire lorsque l'expertise médicale, les structures nationales et la communauté s'unissent.
Grâce à un financement plus stable, à des messages de sensibilisation respectueux de la dignité des patients et à des programmes qui comblent les lacunes existantes, il est possible d'améliorer la qualité des soins contre la tuberculose en Irak. MSF s'engage à obtenir des résultats concrets auprès des communautés, grâce à son partenariat avec les ministères de la Santé et de la Justice, ainsi qu'avec l'Institut national de la tuberculose.
*Les noms ont été modifiés