Clinique de Karuri, Kenya. Des patients attendent de prendre leur méthadone dans le cadre de leur traitement contre l’addiction à l’héroïne.
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Reconstruire les vies brisées par l’addiction

Le mardi 15 juin 2021

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Valérie Guérin, résidente luxembourgeoise, est partie en première mission MSF en janvier dernier dans le comté de Kiambu (sous-comté de Kiambaa) à l’hôpital de niveau 5 de Karuri au Kenya. Avant son retour au Luxembourg en août prochain, nous avons recueilli son témoignage sur son rôle en tant que Promotrice de la santé dans ce projet dédié aux usagers de drogue.

En quoi consiste ce projet ?

Il s’agit d’une clinique dans une zone rurale du pays, qui accueille des personnes consommatrices d’héroïne afin de les aider à décrocher. Nous permettons à ces patients d’accéder à un traitement, la méthadone, que nous leur délivrons chaque jour mais notre soutien ne s’arrête pas là. L’équipe est composée d’un service médical avec des infirmiers et des médecins, de la pharmacie, d’assistants sociaux, de conseillers en addiction, d’une psychiatre et d’un laboratoire. Le laboratoire permet des tests rapides sur les patients pour détecter la présence d’héroïne ainsi que les maladies sexuellement transmissibles afin de proposer des solutions adaptées. Le but de cette clinique est que les traitements et l’accompagnement complet de la personne puissent se faire au même endroit.

Y-a-t-il une particularité dans le fonctionnement de cette clinique ?

Nous travaillons avec ce que nous appelons des pairs. Ce sont mes collègues de tous les jours mais qui ont la particularité d’être eux-mêmes des patients de la clinique et d’être sous traitement pour soigner leur addiction à l’héroïne. Ils connaissent donc bien les difficultés des personnes qui viennent nous voir, ils savent les obstacles que les personnes voulant décrocher de l’héroïne peuvent rencontrer et cela permet de créer un lien plus étroit avec les patients. De plus, cela leur permet d’être responsabilisés et de valoriser leur propre parcours dans la lutte contre l’addiction.

Un flacon de methadone.

Ce fonctionnement implique-t-il aussi des difficultés ?

Il y en a effectivement, de par le fait que les pairs cherchent eux-mêmes à se sortir d’une situation d’emprise de la drogue et que leur situation personnelle est souvent difficile. Mais c’est tout le sens de mon poste : les soutenir du mieux possible pour qu’ils puissent effectuer leur mission de tous les jours et permettre à de nouvelles personnes d’abandonner l’héroïne. Il y a actuellement 8 pairs dans la clinique dont une femme. Ensemble, ils s’occupent de l’accueil des patients et de la mise en place des activités au sein de la clinique : il s’agit de sessions d’éducation à la santé, notamment sous forme de jeux, de discussions et de mise en lien avec le service médical.

Quels sont les autres champs d’action de la clinique et/ou de ton poste ?

Je travaille aussi beaucoup avec les autres organisations sur place. Les rencontrer permet d’en savoir plus sur leurs propres programmes et de voir les synergies possibles. Elles travaillent elles aussi avec les usagers de drogue ou d’autres populations telles que les travailleur-euse-s du sexe, la communauté homosexuelle ou LGBT qui connaissent les mêmes stigmatisations et dont les mondes s’entrecroisent souvent. Le partage d’expérience est important avec ces organisations pour avoir une meilleure connaissance de nos publics et leur offrir la meilleure réponse possible. Enfin, nous prévoyons de leur offrir des formations, sur des sujets tels que la prise en charge des overdoses.

Que retiens-tu déjà de cette expérience ?

Le sentiment d’être réellement utile auprès de ceux qui traversent des difficultés, et leur permettre d’être à leur tour utiles aux autres.

Par exemple, nous avons formé tout le staff de la clinique à la prise en charge des overdoses. Un jour, l’un des pairs m’a dit qu’il avait été contacté la veille en urgence parce qu’une overdose avait eu lieu dans la région. Il s’est immédiatement rendu sur place pour mettre en pratique les connaissances acquises lors de la formation. Il a pu apporter les premiers soins, le temps que la personne puisse être amenée à l’hôpital, et ainsi lui sauver la vie.

Cela montre qu’il est possible de s’en sortir, et que chacun peut trouver sa place dans la communauté

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