Migration : les politiques européennes encouragent la brutalité systématique envers les migrants
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Réalisé à partir des témoignages de ses équipes et de ses patients, et de nombreuses données recueillies aux frontières de l’Union européenne (UE), les équipes de Médecins Sans Frontières ont produit le rapport « Mort, désespoir et misère : les coûts humains des politiques migratoires de l'UE ». Ce dernier détaille les violences à l’encontre des personnes exilées, cautionnées par les politiques européennes et ses États membres et encouragées par la rhétorique de plus en plus déshumanisante des dirigeants européens.
Le rôle des garde-côtes libyens, qui interceptent des personnes en mer avant de les emmener dans des centres de détention en Libye, en est un exemple. De 2016 à 2023, les équipes de MSF ont travaillé dans certains de ces centres de détention où elles ont recueilli des témoignages de patients faisant état de passages à tabac, de traite d’être humains, d’agressions sexuelles et de torture. La promiscuité dans ces centres favorise également la propagation d’épidémies. Entre janvier 2022 et juillet 2023, MSF y a traité 58 cas de tuberculose. Les équipes MSF ont par ailleurs dû plaider pour qu’un homme atteint de tuberculose et malnutri, pesant moins de 40 kg et n’ayant pas accès aux soins appropriés en détention, soit libéré.
Des systèmes de gestion externalisée des personnes exilées de la part de l’UE favorisant la violence, l’entrave à l’accès aux soins et à la sécurité des migrants et réfugiés sont aussi mis en place au Niger, en Serbie et en Tunisie et s’ajoutent aux violences documentées à l’intérieur des frontières européennes.
En Pologne, en Grèce, en Bulgarie et en Hongrie, les équipes de MSF ont documenté la pratique de refoulements répétés aux frontières terrestres de l’UE. Quelque 2 000 kilomètres de murs et de clôtures conçus pour empêcher leur passage, souvent surmontés de barbelés et surveillés par des caméras et des drones, causent des blessures tant physiques que psychiques aux personnes cherchant à les franchir pour trouver refuge en Europe. Les violences commises par les autorités aux frontières sont également à l’origine de blessures physiques et de troubles post-traumatiques chez des personnes qui avaient, pour beaucoup, déjà été victimes de violences avant même d’arriver sur le continent.
À Palerme, en Italie, entre janvier et août 2023, parmi les 57 patients assistés par MSF, 61 % ont déclaré avoir été torturés en Libye, et 58 % avoir subi des actes de torture en détention. Beaucoup présentaient un syndrome de stress post-traumatique.
Les États membres de l’UE se sont également dérobés à leur devoir de secours en mer aux personnes en détresse.
La suppression des capacités européennes de recherche et de sauvetage, accompagnée par leur externalisation à des garde-côtes non-européens, ont fait de la Méditerranée un lieu où les naufrage et les décès évitables sont devenus quasi-quotidiens.
La décision de favoriser des politiques migratoires de violence et de privation, au lieu de rechercher des solutions politiques empreintes d’humanité, devrait heurter la conscience collective. Au lieu de cela, nous assistons à une amplification et même une célébration de ces politiques inhumaines par les dirigeants de l'UE, par des cris de ralliement politiques. Cela va à l'encontre des valeurs fondamentales que l'UE prétend défendre », explique Julien Buha Collette, responsable des opérations de MSF en matière de migration dans plusieurs pays d’Europe.
L'UE et ses États membres doivent changer de cap de toute urgence et privilégier des solutions basées sur l’accueil et l’humanité au prisme uniquement sécuritaire et déshumanisant qui prévaut à l’heure actuelle.