Youssef Al-Khishawi, un agent MSF chargé de l'eau et de l'assainissement, inspecte le camion d'eau lors d'une distribution dans le quartier Tal Al-Sultan de la ville de Rafah, au sud de Gaza. Fèvrier, 2024. © MSF
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Les ONG alertent sur l'effondrement de l'accès humanitaire à Gaza malgré les nouvelles mesures

Le lundi 3 juin 2024

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Alors que les attaques israéliennes s’intensifient à Rafah, 20 organisations humanitaires alertent sur le mirage d’une amélioration engendrée par l’arrivée au compte-goutte de l’aide à Gaza.

En réalité, la réponse humanitaire est au bord de l’effondrement. Les dernières attaques israéliennes perpétrées contre un camp de personnes déplacées à proximité d’installations humanitaires de l’ONU auraient coûté la vie à des dizaines de personnes, dont des enfants, et fait d’innombrables blessés. Dans le même temps, la capacité d’intervention des organismes d’aides et des équipes médicales s’est quasiment effondrée. 

Les solutions temporaires telles qu’un « port flottant » et de nouveaux points de passage ont peu d’impact.

Les organisations humanitaires craignent désormais une augmentation des décès dus à la famine, aux maladies et au non-accès à l’assistance médicale. Les points d’entrée terrestres et maritimes restent fermés à une aide humanitaire significative bloquant notamment l’approvisionnement en carburant, tandis que les attaques s’intensifient dans des zones abritant des civil·e·s.

L’obstruction délibérée exercée aux points de passage sous contrôle israélien, l’intensification des hostilités, les coupures prolongées des télécommunications contribuent à réduire le volume de l’aide acheminée à Gaza, que ce soit en nourriture, carburant ou matériel médical.

Les 20 organisations humanitaires déplorent le fait que l’aide a atteint l’un des niveaux les plus bas observés au cours des sept derniers mois.

Médecins Sans Frontières (MSF), l’un des principaux acteurs humanitaires et médicaux à Gaza, ne parvient pas à acheminer du matériel dans l’enclave depuis le 6 mai. Le manque d’eau potable expose les patient·e·s à un risque élevé de maladie. À plusieurs reprises, des kits de désalinisation et des pompes submersibles ont été envoyés pour mettre en place des systèmes durables d’approvisionnement en eau, mais ces équipements sont presque systématiquement bloqués par les autorités israéliennes.

Les difficultés pour distribuer de l’aide en toute sécurité dans l’enclave sont plus importantes que jamais. En moins de trois semaines, presque un million de Palestinien·ne·s se retrouvent une fois de plus déplacés dans des zones surpeuplées, inadaptées à leur survie. Le besoin de protection des opérations humanitaires, notamment la sécurité des travailleurs et travailleuses humanitaires et la prolifération des checkpoints israéliens à l’intérieur de la bande de Gaza continuent d’entraver la réponse humanitaire et suscitent de vives inquiétudes.

Zenab, une femme enceinte dont le mari a été tué lors d’une attaque aérienne israélienne, a expliqué à CARE International en mars qu’elle avait fui la ville de Gaza pour se rendre à Rafah, puis à Khan Younis. Elle a dû marcher pendant des heures pour se rendre dans différentes pharmacies, hôpitaux et centres de santé afin de trouver des médicaments pour faire face aux complications de sa grossesse, et n’a pas pu trouver suffisamment d’eau potable ou de nourriture. Son médecin a déclaré qu’elle avait besoin d’une césarienne et qu’elle devrait accoucher la semaine prochaine, mais il craint qu’il n’y ait pas de place dans les hôpitaux qui fonctionnent encore partiellement.

À Gaza, le système de santé est anéanti. 

Chaque hôpital a soit reçu des ordres d’évacuation, est assiégé par Israël ou est au bord d’une pénurie de carburant et de fournitures médicales. Le plus grand hôpital de Rafah, Abu Yousef al-Najjar, a dû fermer à la suite d’un ordre d’évacuation émis par Israël, alors que tous les hôpitaux du nord de Gaza sont inaccessibles. Le personnel médical témoigne de décès quotidiens de patients en raison d’un manque de matériel médical. Les médecins, infirmiers, infirmières et autres professionnel·le·s de santé continuent d’être tués ou déplacés de force.

Save the Children déplore que les enfants nécessitant une prise en charge médicale ne puissent pas être évacués hors de Gaza. Faisant face à une grande détresse psychologique, ils ont plus que besoin d’un soutien psychosocial pour survivre aux horreurs auxquelles sont confrontés quotidiennement comme la perte de leur famille et de leurs proches.

L’organisation Juzoor, partenaire d’Oxfam, a déclaré le 19 mai que six des abris déjà surpeuplés qu’elle soutenait à Jabaliya, dans le nord de la bande de Gaza, ont été complètement détruits par les bombardements israéliens. Ces abris disposaient de services médicaux et accueillaient des personnes déplacées issues des zones situées au nord de la bande de Gaza. Les membres du personnel qui ont fui la zone ont trouvé à leur retour des lits de patients brûlés et des équipements et matériels médicaux essentiels détruits.

Les annonces de points de passage supplémentaires et de nouvelles initiatives, telles que le nouveau « port flottant », n’ont fait que donner l’illusion d’une amélioration.

Dans le sud de la bande de Gaza, l’acheminement de l’aide humanitaire a été complètement interrompu. A Rafah, toutes les boulangeries ont été contraintes de fermer. Certaines organisations ont été forcées de suspendre les distributions dans le sud de la Bande de Gaza en raison de l’épuisement des ressources, de l’incapacité à accéder aux entrepôts où elles sont stockées, et de l’insécurité permanente. Elles pourraient bientôt être obligées de les suspendre à Khan Younis, Deir al-Balah et dans la ville de Gaza, car les réserves s’épuisent rapidement.

De nombreux Palestiniens et Palestiniennes survivent désormais en consommant à peine 3 % de leur besoin quotidien en eau, tandis que les températures augmentent et que des maladies comme la diarrhée et l’hépatite se propagent rapidement.

Les annonces de points de passage supplémentaires et de nouvelles initiatives, telles que le nouveau « port flottant », n’ont fait que donner l’illusion d’une amélioration. Elles reviennent pourtant à des mesures superficielles. 

Entre le 7 et le 27 mai 2024 mai, seuls 1000 camions ont pu rentrer dans la bande de Gaza, tous points de passage confondus, y compris via le « port flottant » récemment construit, selon l’ONU. 

Ce chiffre est alarmant compte tenu des besoins humanitaires croissants des 2,2 millions d’habitant·e·s de Gaza, c’est la première fois qu’il est aussi bas ces sept derniers mois.

Le point de passage de Rafah, l’un des principaux points d’entrée des travailleurs et travailleuses humanitaires et de l’aide dans la bande de Gaza, est fermé depuis le 7 mai, lorsque les forces israéliennes en ont pris le contrôle. Pendant ce temps, plus de 2 000 camions d’aide humanitaire restent bloqués à Arish en Égypte, dans l’attente d’une autorisation d’Israël pour entrer. La nourriture pourrit et les médicaments périment alors que des familles sont confrontées à un niveau de famine sans précédent à quelques kilomètres seulement. Bien que le passage de Kerem Shalom reste officiellement ouvert, les camions commerciaux ont été priorisés par rapport aux camions d’aide humanitaire et l’acheminement de l’aide reste imprévisible et irrégulier.

Les organisations humanitaires et de défense des droits humains continuent d’appeler à un cessez-le-feu immédiat et durable pour sauver et protéger les vies humaines à Gaza.

 Elles demandent également la mise en place de routes régulières et fiables pour acheminer l’aide dans la bande de Gaza en toute sécurité. Les organisations appellent les parties belligérantes à respecter le droit international humanitaire (DIH), et Israël à respecter les décisions de la Cour Internationale de Justice, notamment sa plus récente injonction exigeant la fin de l’offensive militaire à Rafah. La communauté internationale, y compris les États tiers et les membres du Conseil de sécurité de l’ONU, restent tenus par leurs obligations en vertu du DIH et des décisions de la CIJ, pour garantir la protection des Palestiniens et Palestiniennes.

Les organisations d’aide humanitaire travaillent nuit et jour afin de fournir une assistance vitale malgré les circonstances dramatiques mais rien de plus ne peut être fait si les États continuent à se dérober à leurs obligations légales ainsi qu’à leur responsabilité morale à garantir un cessez-le-feu.

Signataires

Premiere Urgence Internationale, Médecins du Monde France, Médecins du Monde Switzerland, Médecins du Monde Spain, Danish Refugee Council, Norwegian Refugee Council, CARE International, Médecins Sans Frontières (MSF), Oxfam, Save the Children International, Plan International, Amnesty International, ActionAid International, Humanity & Inclusion/ Handicap International (HI), Norwegian People’s Aid, War Child Alliance, Secours Islamique France, Action For Humanity, Islamic Relief, Mercy Corps.

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