Un infirmier administre un vaccin contre le paludisme à un jeune enfant au centre de santé de Kaburantwa, soutenu par MSF, dans le district de Cibitoke, Burundi
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Burundi : une « triple protection » des enfants contre le paludisme

Le vendredi 3 octobre 2025

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Au Burundi, le paludisme est depuis des années la première cause d’hospitalisation et de mortalité chez les enfants en bas âge. Pour réduire les risques et les conséquences, MSF a initié une approche innovante de « triple protection » dans l’une des régions les plus touchées du pays.

Le paludisme constitue un problème de santé publique majeur au Burundi. Dans ce pays d'environ 14 millions d’habitants, plusieurs millions de cas sont rapportés chaque année. D’après l’OMS, plus de 1 800 décès liés à la maladie ont été enregistrés en 2023, principalement chez les enfants de moins de 5 ans.

Des facteurs géographiques, climatiques, écologiques, sanitaires et socio-économiques expliquent le caractère endémique et l’ampleur de la maladie. Pour y faire face, les autorités sanitaires et leurs partenaires déploient depuis plusieurs années diverses stratégies : distribution de moustiquaires, traitements préventifs, pulvérisations intra-domiciliaires et, depuis fin 2024, lancement de la vaccination antipaludique.

Combiner pour mieux protéger

C’est dans ce cadre que Médecins Sans Frontières et le ministère de la santé ont initié une approche unique dans le pays : combiner de façon massive et simultanée trois approches préventives dans l’un des districts sanitaires les plus touchés au niveau national : Cibitoke.

« Ce district figure parmi ceux enregistrant le plus grand nombre de cas et de décès liés au paludisme, et nos équipes y sont déjà intervenues en urgence pour faire face à des flambées », explique Zakari Moluh, coordinateur du projet MSF à Cibitoke. « Pour apporter une réponse plus durable, nous avons proposé aux autorités une approche pilote : protéger tous les enfants par la vaccination antipaludique, un traitement préventif par chimioprophylaxie pérenne, ainsi que la fourniture de moustiquaires imprégnées. »

À l’échelle nationale, Cibitoke est le seul district de santé à bénéficier de cette stratégie de « triple protection ». L’objectif est de réduire drastiquement l’incidence chez les jeunes enfants grâce à l’effet cumulé de ces trois approches. Près de 17.900 enfants sont couverts par ce programme.

« La vaccination et le traitement préventif se renforcent mutuellement pour assurer une durée d’efficacité optimale », poursuit Zakari Moluh. « En y ajoutant la protection physique par des moustiquaires, nous visons la meilleure protection possible pour les enfants de moins de 5 ans, la tranche d’âge la plus vulnérable. »

Une approche valorisée et peu coûteuse

Concrètement, les équipes de MSF appuient 20 centres de santé du district sanitaire dans la mise en œuvre de cette approche. 

Dans ces centres, chaque enfant bénéficie de quatre doses de vaccin antipaludique RTS,S, entre 6 et 18 mois. Lors de la première vaccination, une moustiquaire imprégnée est remise à la famille. Entre 9 et 24 mois, ces enfants reçoivent également une protection supplémentaire par des comprimés de sulfadoxine/pyriméthamine, une approche préventive appelée « chimioprophylaxie pérenne » (CPP).

Le centre médical de Kaburantwa fait partie des structures appuyées par MSF dans le cadre de ce programme. Sur place, la taille de la file d’attente devant le service de vaccination témoigne de l’engouement des parents pour protéger leurs enfants.

Une infirmière administre un traitement contre le paludisme à un jeune enfant au centre de santé de Kaburantwa, soutenu par MSF, dans le district de Cibitoke.
Comprimés de sulfadoxine-pyriméthamine utilisés comme traitement préventif contre le paludisme

« Quand il était plus petit, mon fils a souvent souffert du paludisme. Il a même déjà été hospitalisé et a dû recevoir une transfusion sanguine », témoigne Claudine Tuyishimire, en sortant du centre après avoir fait vacciner sa dernière-née, Fanny, âgée de 9 mois. « Quand on m’a expliqué la protection offerte aujourd’hui, je n’ai pas hésité. Je suis tout de suite venue. Grâce à cela, les enfants tomberont rarement malades et les parents n’auront plus à venir si souvent à l’hôpital. »

Dans l’ensemble des centres appuyés pour la mise en place de cette approche, l’engouement est similaire. Les salles d’attente restent pleines. Cette affluence résulte aussi des campagnes de sensibilisation et de suivi menées par les agents de santé communautaires auprès des familles et des associations, notamment féminines.

« L’ampleur du problème, ainsi que les frais que la maladie fait supporter aux foyers, suscitent un grand enthousiasme au sein des communautés », explique Adélaïde Ouabo, coordinatrice pays de MSF au Burundi. « Les frais médicaux liés à la prise en charge du paludisme, surtout dans ses formes graves, constituent un poids énorme pour les familles et le système de santé burundais. Ces coûts massifs contrastent avec le faible investissement requis pour mettre en œuvre la stratégie de triple protection. »

L’expérience de MSF à Cibitoke démontre en effet que l’implémentation de ce système est à la fois simple et peu coûteuse au regard des bénéfices qui en découlent. La vaccination antipaludique et les distributions de moustiquaires sont déjà intégrées dans le système sanitaire, et les molécules de traitement préventif sont bon marché. L’approche est donc facilement absorbable par le système de santé, et réplicable ailleurs dans le pays.

L’urgence de soigner reste

La stratégie mise en place semble déjà porter ses fruits. Les équipes de MSF ont constaté une diminution significative des admissions pour paludisme depuis le troisième trimestre de 2025, comparé à la même période l’année précédente - avec notamment une baisse de plus de 40% des admissions pour paludisme sévère à l’hôpital de district de Cibitoke.

Toutefois, afin d’évaluer scientifiquement l’impact exact de la combinaison de ces interventions sur la baisse des cas de paludisme, une équipe dédiée de MSF mène depuis plusieurs mois une recherche opérationnelle. Les résultats finaux permettront d’éclairer les autorités sanitaires burundaises et les partenaires techniques sur le fonctionnement et les résultats de cette approche, afin de leur permettre de faire les meilleurs choix dans les stratégies de lutte contre le paludisme.

 « Dans un contexte de rationalisation des moyens liés à la baisse globale des financements humanitaires, faire les choix les plus efficaces et les plus scientifiquement prouvés est une nécessité absolue », poursuit Adélaïde Ouabo. « Nous sommes contents d’apporter ici notre pierre à l’édifice. »  

Si l’amélioration de la prévention est au cœur de ce projet, l’urgence de soigner les enfants atteints par le paludisme reste là. Les équipes de MSF continuent donc d’appuyer les autorités sanitaires dans la prise en charge médicale. 

Dans les villages, des agents de santé communautaires ont été formés par MSF pour détecter rapidement les signes de paludisme, réaliser des tests de diagnostic rapide et administrer un traitement en cas de résultat positif.

Lorsque des cas plus graves sont identifiés, ils sont immédiatement référés vers un des centres de santé appuyés par MSF, où des superviseurs médicaux aident à renforcer la prise en charge. En cas d’urgence, une ambulance est mise à disposition pour transférer les patients vers l’hôpital de district de Cibitoke, où les équipes de MSF soutiennent la prise en charge des cas les plus complexes en pédiatrie et aux soins intensifs, avec un personnel dédié à la formation et à l’accompagnement des médecins et infirmiers.

En 2023, on estime que 95% des 597.000 décès mondiaux liés à cette maladie ont eu lieu en Afrique. Le paludisme reste une urgence de premier ordre sur le continent, en particulier dans les pays sub-sahariens.

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