La protection des frontières en Grèce ne doit pas se faire au détriment des vies humaines, avertit MSF
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Depuis le début de l’année jusqu’à la fin du mois de mai, il a été dénombré 15 278 arrivées par mer en Grèce, contre 4 749 au cours des cinq premiers mois de 2023, 1 936 au cours de la même période en 2022 et 1 239 en 2021, selon le HCR. Cela représente une augmentation de 222% des arrivées par mer par rapport à l'année dernière, et une augmentation de 1133% par rapport à 2021.
Ce nombre augmente, alors que les politiques migratoires de l'UE sont devenues plus restrictives, limitant les voies d'accès sûres pour les demandeurs d'asile et créant des conditions où les ressources manquent dans les centres d'accueil. En conséquence, les difficultés rencontrées par les personnes fuyant les conflits sont exacerbées, ce qui porte atteinte à leurs droits à la sécurité, à la protection et à la dignité. Cela montre une fois de plus que les politiques restrictives n'empêchent pas les gens de risquer leur vie.
Les conditions dans les centres fermés d'accès contrôlé (CCAC) de Lesbos et de Samos restent inhumaines, avec une absence flagrante de politiques visant à minimiser les risques pour la santé et à permettre le bien-être des personnes, ce qui pose des risques importants pour la santé publique. Des maladies comme la gale et les problèmes gastro-intestinaux aggravent les souffrances des personnes vulnérables en quête de sécurité.
Médecins Sans Frontières (MSF) travaille dans deux centres d'accès contrôlé fermés (CCAC), sur les îles de Samos et Lesbos, où nos équipes fournissent des soins médicaux et mentaux ainsi qu'une assistance médicale d'urgence. La sécurisation et la restriction de la liberté dans les CCAC ont un impact dévastateur sur le bien-être mental et physique des personnes réfugiées.
Parmi nos patients, nous observons une variété d'incidents graves et d'expériences traumatisantes aggravées par les épreuves que les personnes en quête de sécurité ont endurées au cours de leur voyage ou à leur arrivée en Grèce. Les problèmes les plus courants sont la violence sexuelle, la violence physique, la torture, l'incarcération et l'enlèvement, ainsi que les rapports de violence physique de la part des autorités de l'État.
Duccio Staderini, responsable des projets MSF à Lesbos :
Le CCAC de Lesbos, appelé Kara Tepe ou Mavrovouni, est accessible en 20 minutes de route depuis la capitale de l'île, Mytilini, en bus ou en voiture. La zone où est construit le CCAC était autrefois un champ de tir de l'armée, et l'ensemble de la structure est construit sur des rochers menant à la mer. Une extrémité du camp fait face au rivage, l'autre aux collines.
À l'entrée principale, il faut passer un point de contrôle de sécurité et des clôtures grillagées pour entrer ou sortir. Kara Tepe est plus petit, et l'on peut voir les contours du camp une fois que l'on se trouve devant.
Le camp a été construit à la hâte après l'incendie de celui de Moria en septembre 2020, et toutes les structures existantes ne sont pas murées. Certaines zones du camp sont constituées de grandes tentes de stockage (rub halls). Les habitants du camp vivent dans des conteneurs comme ceux du camp de Samos, et lorsque le taux d'occupation atteint un niveau élevé, les nouveaux arrivants peuvent se voir attribuer des tentes à installer entre les structures existantes. »
En outre, les conditions difficiles dans les CCAC et les procédures d'asile prolongées affectent la santé mentale des résidents des camps. Il est urgent de mettre en place des services de santé adéquats et variés afin de répondre aux besoins et aux droits fondamentaux des demandeurs d'asile.
En novembre 2023, MSF publiait un rapport intitulé In Plain Sight: The human cost of migration policies and violent practices at Greek sea borders [en français : A la vue de tous : le coût humain des politiques migratoires et des pratiques violentes aux frontières maritimes grecques], contenant des informations recueillies entre août 2021 et juillet 2023 par ses équipes médicales à Lesbos et Samos.
S'appuyant sur les témoignages de 56 patient·e·s, ainsi que sur les données et observations médicales de MSF, ce rapport révèle une réalité choquante quant à l'accueil réservé aux personnes cherchant refuge en Europe, dont beaucoup fuient la violence et les persécutions dans leur pays d'origine et ont déjà effectué un périple dangereux et souvent traumatisant pour arriver jusqu'ici.