Des demandeur·euse·s d'asile déclarent avoir été battu·e·s, fouillé·e·s à nu et refoulé·e·s en mer
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S'appuyant sur les témoignages de 65 patient·e·s, ainsi que sur les données et observations médicales de MSF, ce rapport révèle une réalité choquante quant à l'accueil réservé aux personnes cherchant refuge en Europe, dont beaucoup fuient la violence et les persécutions dans leur pays d'origine et ont déjà effectué un périple dangereux et souvent traumatisant pour arriver jusqu'ici.
Certain·e·s patient·e·s rapportent avoir été victimes de violences avant même d'avoir atteint la terre ferme. « Dès que l’on est entrés dans les eaux grecques, un petit bateau gris est venu dans notre direction, a déclaré Fatima (nom modifié).
Un homme vêtu de noir, le visage couvert, a sauté sur notre bateau. Il tenait un bâton et a commencé à frapper la personne qui se trouvait devant lui. Puis il a arraché le moteur et l'a laissé couler. On s’est retrouvés au milieu de la mer sans moteur. »
D'autres patient·e·s MSF décrivent comment, arrivé·e·s à Lesbos ou à Samos sur de petites embarcations, ils et elles ont été intercepté·e·s par des individus en uniforme ou des hommes masqués non identifiés. Ils et elles ont alors été soumis·e·s à des traitements dégradants et violents, les poignets et les chevilles attachés par des liens en plastique, ont été battu·e·s avec des matraques et des bâtons, injurié·e·s et forcé·e·s de subir des fouilles corporelles intrusives devant des inconnus.
Elisabeth [nom modifié] a raconté comment des personnes de son groupe, dont une femme enceinte, ont été menottées et battues : « Ils l'ont traînée par terre... Ils les ont attachées comme ça [en joignant les poignets devant son corps], ils ont aussi attaché la femme enceinte. Ils ont même marché sur le ventre de l'autre femme, tout en la battant. »
Certain·e·s patient·e·s rapportent que les objets qu'ils possédaient, notamment leur téléphone portable, leur argent et leurs médicaments, ont été confisqués avant que les autorités ne les embarquent de force sur des bateaux, les ramènent en mer, les transfèrent sur des radeaux de sauvetage, puis les laissent dériver – une pratique illégale connue sous le nom de « pushbacks » (refoulements).
Au cours des deux dernières années, les équipes MSF à Lesbos et à Samos ont apporté une assistance médicale à 7 904 personnes, dont 1 520 enfants, peu après leur arrivée sur les îles. Beaucoup de ces nouveaux·elles arrivant·e·s étaient dans un état de détresse émotionnelle, épuisé·e·s, mouillé·e·s, assoiffé·e·s, affamé·e·s, exposé·e·s à la chaleur ou le froid extrêmes et couvert·e·s de blessures et d'ecchymoses, apparemment à la suite de violences. Parmi eux·elles se trouvaient des femmes à un stade avancé de leur grossesse, des nouveau-nés, des mineurs non accompagné·e·s et des personnes âgées. Les médecins MSF ont soigné 557 personnes pour blessures physiques et les équipes de santé mentale MSF ont assuré 8 621 consultations psychologiques et psychiatriques. Certain·e·s patient·e·s souffrent de stress post-traumatique, conséquence directe de leur arrivée en Grèce.
« La plupart de ces personnes ont fui des pays où les violences et les persécutions sont très fréquentes, explique Sonia Balleron, chef de mission MSF en Grèce.
Beaucoup ont survécu à d'horribles périples, souffrant notamment de blessures de guerre, victimes de violences sexuelles et de trafics d'êtres humains. Pour ces personnes déjà vulnérables, la violence ou les mauvais traitements à la frontière aggravent encore les conséquences médicales et psychologiques de ces expériences traumatisantes. »
Parallèlement, les organisations de la société civile et celles d'aide qui tentent d'apporter une assistance aux personnes vulnérables sur les îles de la mer Egée ont vu leurs actions entravées par les autorités et courent le risque d'être poursuivies en justice.
Nous exhortons le gouvernement grec et les dirigeants européens à prendre des mesures immédiates pour s'assurer que les personnes qui cherchent une protection en Grèce soient traitées avec humanité et dignité, déclare le Dr Christos Christou, président international de MSF.
Il s'agit notamment de mettre fin au climat d'impunité dont jouissent les auteur·rice·s de violences à l'encontre des personnes en quête de sécurité, et ce dans le respect du droit européen et international.
Nous demandons également l'arrêt définitif des refoulements aux frontières, la mise en place, sur les îles de la mer Egée, d'un système de contrôle indépendant et l'intensification des opérations de recherche et de sauvetage en mer. Enfin, nous appelons à ce que les personnes sollicitant une protection aient accès à des procédures d'asile équitables et à une assistance médicale et humanitaire à leur arrivée. »